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Ça va vrombir
Camille Pépin et la jeune garde française, le dernier opéra de George Benjamin, les galaxies déglinguées d’Olga Neuwirth : côté création, il y en aura pour tous les goûts.
Ce n’est pas simplement un devoir pour le Philhar de créer des œuvres d’aujourd’hui. C’est une vocation. Mieux, une passion ! Et diable que la saison qui se profile nous affûtera les oreilles. Il y en aura pour tous les goûts : du lyrisme de Tatiana Probst (le 13 septembre) aux couleurs féériques de Camille Pépin (le 18 juin), en passant par la nervosité cisaillée de Clara Iannotta (le 16 novembre) et la folie azimutée de Simon Steen-Andersen (le 27juin). Voilà pour la jeune garde, sans banderole ni bannière esthétique ! Les « maîtres » made in France seront bien sûr de la partie, avec des œuvres d’Éric Tanguy qui chatoieront assurément (les 27 février et 19 juin), en passant par un Concerto pour percussions d’Édith Canat de Chizy qui saura faire vrombir l’Auditorium, ou encore l’ivresse virtuose de la Cadenza III de Bruno Mantovani, un concerto pour quatuor à cordes, dédié aux archets virevoltants du quatuor Diotima. On reprendra aussi des œuvres récentes, comme l’impressionnant Waves, un « duo » pour orgue et orchestre composé par Pascal Dusapin, qui n’a été donné qu’une seule fois à Paris, sans public, Covid oblige ! En plus de nos compatriotes, Radio France accueillera également la fine fleur de la création contemporaine internationale. À commencer par le dernier opus lyrique scintillant du Britannique George Benjamin, Picture a day like this, présenté au Théâtre des Champs-Élysées (du 25 au 31octobre).
La modernité est aussi un héritage, comme le prouve la soirée Boulez/Manoury du 17 janvier : le maître et l’élève, dans une filiation passionnante et toute impressionniste. Héroïne du festival Présences 2023, la Coréenne Unsuk Chin revient pour un deuxième tour de piste. Ça vous a plu ? Vous en voulez encore ? Le 19 décembre, le National donne la création française de sa grande fresque Alaraph, Ritus des Herzschlags, une symphonie de battements de cœurs.
Mais le grand moment contemporain, pour les aventuriers qui aiment repousser les frontières de l’inattendu, c’est le festival Présences ! Du 4 au 9 février, Radio France va vibrer à l’unisson au rythme de la musique de la grande Olga Neuwirth, compositrice autrichienne née en 1968. Ses passions sont tellement multiples qu’elles créent une galaxie en forme d’archipels. Ses inspirations s’étendent des houles de Moby Dick d’Herman Melville au punk berlinois, en passant par le folklore yiddish, la littérature queer de Virginia Woolf jusqu’aux étendues ténues de Luigi Nono. Le monde d’Olga Neuwirth est comme une réalité inversée, « upside down » comme on dit en anglais, où notre univers contemporain apparait à mille à l’heure, strié de rais de lumière et de néons stroboscopiques. D’ailleurs, la musique de Neuwirth se forge sur le dialogue et s’épanouit donc, comme une évidence, dans la forme du concerto. Que ce soit dans Locus...doublure...solus pour piano et ensemble, inspiré par une nouvelle labyrinthique de Raymond Roussel (le 7 février), ou dans le furieux Trurliade – Zone Zero pour percussions et orchestre (le 8 février) ou bien encore dans son « tube » Torsion, dont on entendra la version pour basson et ensemble lors du concert de clôture (le 9 février). Cela dit, Présences, ce n’est pas qu’une tête d’affiche, c’est aussi une galaxie de compositrices et de compositeurs, dont les œuvres connexes trouvent une place naturelle au sein de la programmation. Que ce soit autour des œuvres de Marc Monnet, Michaël Levinas, Franck Bedrossian, Aurélien Dumont, Raphaèle Biston, Éric Montalbetti... On entendra même une création très attendue d’un ancien héros du festival, Tristan Murail. Le tout dirigé par des spécialistes du genre, notamment le « grand frère » d’Olga Neuwirth : l’Allemand Matthias Pintscher. À bon entendeur, la création est vivante, vivace, et se fait entendre sur tous les tons cette saison à Radio France !
Thomas Vergracht
« Le monde d’Olga Neuwirth est comme une réalité inversée, upside down comme on dit en anglais, où notre univers contemporain apparait à mille à l’heure, strié de rais de lumière et de néons stroboscopiques. »