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Le Théâtre Ledoux de Besançon
C’est la rentrée. Dans le cadre du Grand Tour, les plus belles scènes de France continuent d’accueillir l’Orchestre National de France et son directeur musical Cristian Măcelaru. Rendez-vous le 14 septembre au Théâtre Ledoux, au cœur de Besançon.
En 1778, sous le règne du roi Louis XVI, l’architecte Claude-Nicolas Ledoux vient de terminer la Saline royale d’Arc-et-Senans. Il est alors appelé par l’intendant de Franche-Comté Charles-André de Lacoré pour superviser la construction d’un théâtre, qui deviendra donc le théâtre Ledoux. Édifié entre 1778 et 1784, sous la direction de l’architecte Bertrand, le bâtiment est orné d’une entrée décorée de six colonnes ioniques, à l’instar d’un temple antique. La conception de la salle est une innovation : Ledoux supprime les loges privées et dote le parterre de sièges. Jusqu’alors, le peuple s’y tenait debout. Le nouveau théâtre peut maintenant accueillir deux mille spectateurs. En rupture avec les théâtres à l’italienne, la primauté est donnée à la visibilité par l’ensemble des spectateurs, qu’ils soient modestes ou non. Pour cela, Ledoux élargit également la scène. Et puis… terminées les statues et les dorures ! Ni surplus, ni obstacle, rien ne doit distraire l’attention du public. Ledoux défend sa vision d’une architecture égalitaire : les artistes joueront pour toutes et tous. Sa gravure célèbre affirme l’importance du regard dans son œuvre et témoigne de sa modernité. Les décors, eux, sont peints dans des tonalités bleues, dorées et argentées.
Pendant la Révolution française et bien après, le théâtre est laissé à l’abandon. C’est au milieu du XIXe siècle que sont confiées, à l’architecte Delacroix, d’importantes modifications, à l’intérieur comme à l’extérieur. Hélas, le 29 avril 1958, à 6h06, la sirène de la caserne des pompiers retentit : un incendie ravage le bâtiment. De ce joyau architectural, seuls subsistent la façade, les six colonnes, quelques murs et partitions. Si le théâtre est reconstruit rapidement, l’intérieur n’est réaménagé qu’en 1994, avec un peu plus de mille sièges (contre 2000 au XVIIIe siècle).
La première fosse d’orchestre au monde
Fautivement attribuée à Richard Wagner, ce n’est pas à Bayreuth qu’est conçue la première fosse d’orchestre… mais bel été bien au Théâtre Ledoux. Une révolution dans l’architecture des théâtres musicaux. Si la géométrie de la salle en hémicycle répercute le son uniformément, cette nouveauté permet de mieux voir les comédiens, chanteurs et danseurs. Lors des représentations scéniques, la fosse cache les musiciens, tout en offrant un idéal sonore. Passionné d’acoustique et de visibilité absolue, Ledoux pense ainsi un parfait équilibre des masses sonores entre les voix et l'orchestre. Totalement approuvée par Wagner, un siècle plus tard, pour Bayreuth (festival fondé par le compositeur en 1876), l’idée de Ledoux est d’abord de permettre au public de porter toute son attention sur la musique, le drame et le caractère sacré de l’œuvre.
Connaitre le lieu… pour (encore) mieux assister au concert
L’œuvre architecturale de Ledoux, tant par ses aspirations utopiques que par ses modifications drastiques du rapport entre scène et public, a engendré de profondes mutations au sein de la société moderne. Par le clin d’œil des colonnes et par sa vision globale, il renoue avec l'antiquité, en rétablissant le théâtre dans sa fonction pédagogique et sociale. Avec sa rénovation générale en 2019, porté vers un meilleur accueil du public, le Théâtre Ledoux garde intacte sa volonté première : pour toutes et tous. Alors… bienvenue au Théâtre Ledoux le 14 septembre ! Cristian Măcelaru et l’Orchestre National de France vous proposent un programme romantique allemand associé au modernisme français de la première moitié du XXe siècle. Accompagnés par Julia Fischer, ils vous porteront, que vous soyez au parterre ou aux étages, au cœur des plus belles sphères sonores.
Gabrielle Oliveira Guyon